Dans une lettre poignante rendue publique, Grégory Laccruche Alihanga, ancien maire d’Akanda et frère de Brice Laccruche Alihanga, sort de son silence pour dénoncer les dérives du régime Bongo et l’attitude actuelle de certains de ses anciens dignitaires, désormais passés dans le camp des victimes. Un témoignage fort, à la croisée du politique et du personnel.
Après plusieurs années de mutisme, Grégory Laccruche Alihanga a décidé de s’exprimer publiquement. « Je parle car ceux qui ont incarné l’oppression se parent désormais des habits de victimes », écrit-il. L’ancien édile d’Akanda entend dénoncer ce qu’il considère comme une tentative de réécriture de l’histoire récente du Gabon par d’anciens membres du pouvoir déchu.
Au cœur de ce réquisitoire, un épisode-clé : en 2019, alors encore en fonction, Grégory affirme avoir été convoqué au domicile de Noureddin Bongo Valentin. L’objectif : le pousser à porter de fausses accusations contre son frère, Brice Laccruche Alihanga, alors tout-puissant Directeur de cabinet du chef de l’État. Face à son refus, il dit avoir été arrêté trois jours plus tard, dans le cadre de l’opération « Scorpion », officiellement lancée pour lutter contre la corruption.
Grégory Laccruche Alihanga évoque ensuite une détention prolongée sans jugement, marquée par l’isolement, des conditions de vie inhumaines, et l’absence totale de soins ou de contact avec sa famille. « J’étais un otage, une monnaie d’échange pour faire plier mon frère », affirme-t-il, décrivant quatre années d’oubli judiciaire dans l’annexe 1 de la prison centrale de Libreville.
Il dénonce également la pression psychologique exercée pour le contraindre à accuser son frère en échange d’une remise en liberté. « Je sortirai comme j’y suis entré : fidèle à mes valeurs », martèle-t-il.
Dans un ton sans concession, il s’en prend directement à ceux qui, selon lui, orchestrèrent sa détention, mais qui dénoncent aujourd’hui leurs propres conditions de traitement dans le contexte politique actuel. « Ceux qui m’ont fait ça se plaignent aujourd’hui. Ils parlent de “traitement de chien”. Je leur réponds : vous nous avez traités pire que des cafards », écrit-il avec amertume.
Grégory Laccruche Alihanga rappelle que l’ONU l’avait reconnu comme prisonnier politique dès décembre 2020 et exigé sa libération. Une décision ignorée par les autorités de l’époque, qui invoquaient la souveraineté judiciaire gabonaise. Une plainte avait également été déposée en France pour séquestration arbitraire.
Au-delà de sa propre souffrance, il évoque les conséquences sur ses proches : sa mère, victime de deux AVC, son frère gravement malade, et les pressions sur sa compagne. Ce n’est qu’après l’arrivée au pouvoir du général Brice Clotaire Oligui Nguema qu’un début de réparation aurait été amorcé, selon lui.
Fermement, il rejette toute logique de revanche mais affirme vouloir contribuer à la restauration de la vérité historique : « Je ne cherche pas à me venger. Je veux juste que les rôles ne soient pas inversés. » Dans sa lettre, il accuse directement les anciens responsables du régime d’avoir mis en place un système d’oppression qu’ils cherchent aujourd’hui à renier.
Il annonce également son intention de recourir à toutes les voies légales, nationales comme internationales, pour empêcher toute tentative de réhabilitation mensongère : « Fuir vos responsabilités est illusoire ; je veillerai à ce que jamais vous n’en ignoriez l’évidence. »
Grégory Laccruche Alihanga brise le silence et dénonce « l’hypocrisie des bourreaux d’hier »

